L’événement de la veille était bien entendu la présence de L’Echange de Clint Eastwood en sélection officielle avec trois séances surbookées de spectateurs impatients de découvrir la nouvelle œuvre de l’un des chouchous cannois qui, curieusement, n’a jamais été palmé en tant que réalisateur. Le pitch : à la fin des années vingt à Los Angeles, un jeune garçon disparaît pendant quelques mois et revient à la maison. Mais sa mère ne le reconnaît pas… Avec ce point de départ rappelant Le Retour de Martin Guerre, Eastwood construit un film à charge contre la police de L.A. et invite chaque citoyen à remettre en cause les pouvoirs établis. Dans le rôle de la mère courage, Angelina Jolie, toute en larmes et en beauté, affronte les méchants policiers avec le soutien du révérend local interprété par John Malkovich et finit par être exaspérante tant elle passe son temps à pleurer. Il faut dire qu’il est question de crimes d’enfants et que l’horreur de la situation entraîne une émotion impossible à réfréner. Difficile alors d’afficher un point de vue critique qui ne soit pas biaisé par notre irrépressible compassion. Le classicisme de la réalisation, soignée, efficace, se perd parfois dans les rues d’un décor d’époque reconstitué avec une netteté trop parfaite. A moins d’être un inconditionnel groupie de Clint Eastwood, reconnaissons que L’Echange déçoit : trop lisse, trop léché, trop prévisible, en dépit de plongées dans les recoins les plus sombres des âmes enfantines et d’une posture toujours aussi ambiguë entre ordre et désordre.
Dans la série des courts : attention petite merveille ! Skhizein de Jérémy Clapin (Sélection ACID et Semaine Internationale de la Critique) raconte comment un homme est à 91 centimètres de lui-même suite à une chute de météorite. Drôle, inquiétant, philosophique, c’est notre Palme du Court !